Suivez les recommandations du club de lecture Reading_is_sexyy pour nous aider à faire notre choix chez le libraire en cette période aussi froide que festive.

Il y a des grands livres pr&eacute;tentieux qui pensent &ecirc;tre le symbole d&rsquo;une &eacute;poque et l&rsquo;&eacute;tendard d&rsquo;une cause. Les auteurs prennent leur ranc&oelig;ur personnelle pour un combat universel alors qu&rsquo;il n&rsquo;en est rien. Puis, il y a des petits livres&nbsp;&nbsp;qui apparaissent discr&egrave;tement, doucement sans rien pr&eacute;tendre, qui osent &agrave; peine exister sur les piles des librairies et qui s&rsquo;excuseraient presque d&rsquo;avoisiner des &eacute;crivains c&eacute;l&egrave;bres. Il y a des phrases jet&eacute;es sur un clavier d&rsquo;ordinateur, pianot&eacute;es &agrave; tout allure sur un smartphone ou griffonn&eacute;es dans un cahier, qui mises bout &agrave; bout, cr&eacute;ent un miracle.&nbsp;

Ce magnifique roman est bien plus qu&rsquo;un d&eacute;clic d&rsquo;&eacute;criture, c&rsquo;est une vocation qui a &eacute;clos et avec elle, une &oelig;uvre indispensable ! L&rsquo;histoire de Mona emm&egrave;ne avec elle toutes ces enfances meurtries, ces c&oelig;urs bris&eacute;s&nbsp;&nbsp;et ces petits corps souill&eacute;s par des monstres aux allures d&rsquo;hommes. Elle leur rend hommage et leur parle de sa petite voix fr&ecirc;le au nom de nos yeux qui se d&eacute;tournent trop souvent. Mais elle emporte aussi avec elle l&rsquo;&eacute;pop&eacute;e des juifs s&eacute;pharades, grands oubli&eacute;s de l&rsquo;exil qui portent en eux cette douleur &agrave; la fois commune et irr&eacute;versible.

&quot;Une nuit apr&egrave;s nous&quot;&nbsp;&eacute;crit l&rsquo;essentiel de ces travers&eacute;es et du d&eacute;racinement, au gr&eacute; de m&eacute;taphores aussi douces que leur r&eacute;alit&eacute; est &acirc;pre et brutale.

Une nuit après nous (Delphine Arbo Pariente)

Coup de&nbsp;&nbsp;c&oelig;ur unanime pour ce livre &agrave; couper le souffle. Une succession de mots forts et incisifs qui d&eacute;crivent &agrave; merveille la mis&egrave;re et l&rsquo;horreur v&eacute;cues par une fratrie, dont la vie n&rsquo;est que survie.

Dans les cit&eacute;s de Marseille, sous l&rsquo;&eacute;gide d&rsquo;un p&egrave;re tortionnaire aux vices innombrables, deux fr&egrave;res et une s&oelig;ur tentent de vivre leur enfance en faisant fi de l&rsquo;horreur de leur existence. Entre coups, humiliations et drogues, les souvenirs qui leur restent ne sont que m&eacute;pris et soumission faisant d&rsquo;eux des adultes bris&eacute;s aux rep&egrave;res fragiles. Le livre aussi envoutant que percutant nous embarque en quelques lignes dans le logement crasseux de la cit&eacute; Artaud, et au c&oelig;ur du passage 50 o&ugrave; les gitans r&egrave;gnent en ma&icirc;tre avec leur musique joyeuse et leurs traditions si chaleureuses.

Rythm&eacute; par la bande son de Michael Jackson et IAM, &agrave; l&rsquo;aube des ann&eacute;es 2000, se d&eacute;roule la vie de ceux qui ne sont pas n&eacute;s sous une bonne &eacute;toile et qui combattent des d&eacute;mons immortels.

 Il est des hommes qui se perdront toujours (Rebecca Lighieri)

Bonheur immense&nbsp;&nbsp;de retrouver Am&eacute;lie Nothomb dans la peau ou plut&ocirc;t sous la plume de son p&egrave;re, d&eacute;c&eacute;d&eacute; lors du premier confinement et auquel elle n&rsquo;a pu dire au revoir.

La fille ressuscite le p&egrave;re et lui rend un hommage poignant m&ecirc;me s&rsquo;il n&rsquo;est pas pr&eacute;sent&eacute; ainsi. Trop intelligente, malicieuse et dr&ocirc;le pour &eacute;crire des lignes grandiloquentes ou larmoyantes sur le p&egrave;re disparu, l&rsquo;&eacute;crivaine lui offre une gloire posthume &agrave; travers un exercice de style aussi original que remarquable ! L&#39;autrice&nbsp;dresse le portrait &agrave; la premi&egrave;re personne du singulier, de cet h&eacute;ros h&eacute;mophobe et atypique, protagoniste principal et pourtant m&eacute;connu de l&rsquo;histoire de la d&eacute;colonisation.

Un roman cin&eacute;matographique qui nous transporte d&rsquo;une prise d&rsquo;otage sanguinaire au Congo aux turpitudes de la haute soci&eacute;t&eacute; belge entre vie mondaine en ville et &eacute;ducation darwinienne dans un ch&acirc;teau en d&eacute;cr&eacute;pitude. L&rsquo;h&eacute;moglobine est aussi omnipr&eacute;sente qu&rsquo;elle terrorisait le p&egrave;re. Tout un symbole sur nos liens de sang&nbsp;et la valeur de celui-ci lorsqu&rsquo;il coule encore dans nos veines.

Premier sang (Amélie Nothomb)

Vaste sujet que celui auquel s&rsquo;attaque l&rsquo;autrice&nbsp;: le bonheur. Notre perception de celui-ci, notre aptitude &agrave; en saisir l&rsquo;essence puis &agrave; en profiter pleinement. L&rsquo;histoire qui se d&eacute;roule nous confirme qu&rsquo;il n&rsquo;y a pas de mode d&rsquo;emploi et que les cl&eacute;s du bonheur sont innombrables et propres &agrave; chacun.

On fait ainsi la rencontre de deux femmes, Clarisse et &Egrave;ve, aux vies diam&eacute;tralement oppos&eacute;es. De leurs origines &agrave; leurs constructions, on identifie leurs failles et leurs forces tout au long du livre, &agrave; travers des moments de vie et du quotidien. L&rsquo;une capture chaque moment de joie aussi fugace et instantan&eacute; soit-il, tandis que l&rsquo;autre se projette sur une construction &agrave; long terme qui implique patience et renoncement. Les destins des deux protagonistes se croisent et s&rsquo;entrechoquent dans un r&eacute;cit &eacute;mouvant.

Une belle lecture o&ugrave; on se laisse porter par ces vies dessin&eacute;es et racont&eacute;es avec talent.

La définition du bonheur (Catherine Cusset)

On ne pr&eacute;sente plus cette &oelig;uvre classique et fondamentale de Maupassant. Il s&rsquo;agit bien s&ucirc;r du talent d&rsquo;&eacute;criture, de ces mots qui n&rsquo;ont l&rsquo;air de rien mais qui r&eacute;ussissent au travers de la description de feuilles d&rsquo;un arbre &agrave; rendre une &eacute;motion vivante. L&rsquo;amour r&eacute;el que l&rsquo;auteur porte &agrave; cette terre normande faite de grisaille, de pluie, de froid contraste avec un d&eacute;dain m&ecirc;l&eacute; d&rsquo;admiration pour une M&eacute;diterran&eacute;e et une Corse qui repr&eacute;sentent l&rsquo;aventure, l&rsquo;espoir d&rsquo;un bonheur possible, l&rsquo;exaltation et les frissons de la vie.

Cette m&eacute;taphore est bien celle de la vie de notre h&eacute;ro&iuml;ne, Jeanne, qui s&rsquo;&eacute;tait permise, encore enfant, &agrave; r&ecirc;ver d&rsquo;un bonheur absolu, pur, propre. Son destin ne sera finalement que trahisons, d&eacute;ceptions, douleurs et amertume. On pourrait lire dans cette &oelig;uvre le destin malheureux mais assez banal d&rsquo;une noble enfant de campagne qui n&rsquo;a pas su faire face aux affronts de la vie. Pourtant il y a autre chose qui questionne et qui est d&rsquo;une actualit&eacute; affolante : faut-il esp&eacute;rer ? Comment prot&eacute;ger ses enfants tout en les pr&eacute;parant aux coups de la vie ? Les salauds gagnent-ils toujours ? Comment pr&eacute;server son int&eacute;grit&eacute; ? Faut-il toujours choisir la vie ?

Une vie (Maupassant)

Que la litt&eacute;rature peut &ecirc;tre belle lorsque mani&eacute;e &agrave; la perfection, celle-ci se d&eacute;nude et se d&eacute;v&ecirc;tit de ses fioritures ! Quelle po&eacute;sie sublime se niche derri&egrave;re des phrases simples et des descriptions qui semblent si &eacute;videntes ! Quelle id&eacute;e saugrenue, absurde et g&eacute;niale de d&eacute;peindre la monstruosit&eacute; avec nos mots comme pour nous avertir que l&rsquo;horreur est d&rsquo;abord et avant tout une affaire de quotidien. Un si&egrave;cle d&rsquo;Histoire travers&eacute; au c&ocirc;t&eacute; de la talentueuse Anne Berest ne peut laisser aucun.e lecteur.trice indemne.

&quot;La Carte Postale&quot; nous entraine sur les routes de l&rsquo;exil juif avec les Rabinovitch, Emma et Ephra&iuml;m, arri&egrave;res grands parents de l&rsquo;autrice&nbsp;et de leurs enfants No&eacute;mie et Jacques dont les noms figurent &agrave; c&ocirc;t&eacute; de celui de leurs parents sur la fameuse carte postale anonyme ainsi que sur la liste des d&eacute;port&eacute;s &agrave; Auschwitz et de Myriam, a&icirc;n&eacute;e de cette fratrie et unique survivante d&rsquo;une famille d&eacute;cim&eacute;e par l&rsquo;horreur, &agrave; laquelle on s&rsquo;identifie si facilement. La plume d&rsquo;Anne Berest nous transporte, nous alerte sur notre &eacute;chine qui se courbe face &agrave; l&rsquo;antis&eacute;mitisme moderne, nous &eacute;claire sur un pass&eacute; qu&rsquo;&agrave; force de comm&eacute;morer on a fini par oublier et nous interroge sur la notion d&rsquo;identit&eacute;. Myriam, vit ses premiers balbutiements, cach&eacute;e &agrave; l&rsquo;arri&egrave;re d&rsquo;une charrette sur les routes de Moscou en 1919. Sa vie d&eacute;bute comme un roman russe et se termine dans la langue dans son enfance.

Carte postale (Anne Berest)

L&#39;&eacute;motion qui nous gagne &agrave; la lecture de ce r&eacute;cit, est assortie de larmes, celles qui accompagnent les absents. Celui que Clara DM appelle l&rsquo;enfant nous laisse un vide immense.

Par ses mots si puissants, l&#39;autrice&nbsp;nous invite dans sa fratrie, sujet finalement peu d&eacute;velopp&eacute; en litt&eacute;rature. On lit souvent le lien m&egrave;re fille et si peu celui des fr&egrave;res et s&oelig;urs, d&#39;autant plus lorsque le fr&egrave;re est &quot;inadapt&eacute;&quot;&nbsp;et deviendra pr&eacute;matur&eacute;ment l&#39;absent, un absent dont la pr&eacute;sence habite tout le r&eacute;cit.

Avec courage et sinc&eacute;rit&eacute;, Clara DM aborde un sujet essentiel et nous livre un r&eacute;cit d&rsquo;une honn&ecirc;tet&eacute; immense et bouleversante. Elle rend ici un vibrant et poignant hommage &agrave; son fr&egrave;re disparu trop jeune. Son regard bienveillant sur la fratrie n&rsquo;est pas sans nous rappeler les mots tendres que la grand-m&egrave;re confie &agrave; sa petite fille : &quot;Si un enfant va mal, il faut toujours avoir un &oelig;il sur les autres.&quot;&nbsp;Une lecture puissante et n&eacute;cessaire&hellip;

7 livres à emporter au coin du feu cet hiver

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