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 <div class="x6prxxf x1fc57z9 x1yc453h x126k92a x14ctfv" dir="auto" role="none">C'est l'histoire d'un amour contrari&eacute;, d'une histoire d'amour qui doit arriver, mais n'arrive jamais. L'histoire de May et John : leur non-histoire, interpr&eacute;t&eacute;e par Ana&iuml;s Demoustier et Tom Mercier. L'adaptation tr&egrave;s libre d'une nouvelle de Henry James, "La B&ecirc;te dans la jungle", publi&eacute;e en 1903 et transpos&eacute;e dans notre monde moderne, dans l'espace-temps d'une bo&icirc;te de nuit. Un film de sensations, hypnotique et fantasmagorique une exp&eacute;rience de cin&eacute;ma, qui exige qu'on s'y plonge. Un abandon.</div>
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"L&rsquo;id&eacute;e d&rsquo;un amour qui n&rsquo;est pas vraiment v&eacute;cu, c&rsquo;est quelque chose que j&rsquo;ai rarement vu au cin&eacute;ma."&nbsp;On &eacute;coute Ana&iuml;s Demoustier faire la promo du film La B&ecirc;te dans la jungle, et c&rsquo;est vrai qu&rsquo;on n&rsquo;a pas l&rsquo;habitude de la voir dans ce genre d&rsquo;exercice quasiment incantatoire, o&ugrave; l&rsquo;atmosph&egrave;re prime sur la narration, les corps en transe sur l&rsquo;exigence de r&eacute;ponses et de r&eacute;solutions. "En fait, c'est un film qui laisse au spectateur la libert&eacute; de r&eacute;fl&eacute;chir et de se projeter&hellip; Et il faut accepter de rentrer dedans ! Moi, je trouve important que la salle de cin&eacute;ma soit un lieu d&rsquo;exp&eacute;rience au sens primitif, comme une exp&eacute;rience sensorielle. Et ce film en est une : c&rsquo;est une immersion dans une bo&icirc;te de nuit, un huis clos, et c&rsquo;est &ccedil;a qui m&rsquo;a plu. En fait, faut arr&ecirc;ter de chercher du sens partout, de la morale, de la raison&hellip; C&rsquo;est dingue comme les gens ont peur de s&rsquo;abandonner !" Alors qu&rsquo;on a plut&ocirc;t l&rsquo;habitude de la voir dans des r&ocirc;les jubilatoires d&rsquo;amoureuses (l&rsquo;&eacute;patant Les Amours d&rsquo;Ana&iuml;s de Charline Bourgeois-Tacquet, le tr&egrave;s espi&egrave;gle La Pi&egrave;ce rapport&eacute;e&nbsp;d&rsquo;Antonin Peretjatko), l&rsquo;actrice lilloise &eacute;tonne ici (et subjugue) dans ce r&ocirc;le de femme qui "petit &agrave; petit perd sa candeur", face &agrave; cet homme mutique incapable d&rsquo;aimer, de vivre. "&Ccedil;a m&rsquo;int&eacute;ressait d&rsquo;incarner quelqu&rsquo;un qui d&eacute;cline, je trouve &ccedil;a beau ! Parce qu&rsquo;on raconte souvent au cin&eacute;ma des histoires de personnages qui se d&eacute;ploient, s&rsquo;&eacute;panouissent et l&agrave;, c&rsquo;&eacute;tait le trajet inverse : le film raconte en fin de compte que l&rsquo;amour isole, pour le meilleur et pour le pire." C&rsquo;est peut-&ecirc;tre &ccedil;a la "b&ecirc;te" du titre, cet amour qu&rsquo;ils ont laiss&eacute; passer, cette chance qu&rsquo;ils n&rsquo;ont pas su saisir, cet absolu qu&rsquo;ils ont trop attendu, pour finir par le perdre - et se perdre. "En fait, &ccedil;a parle de nous tr&egrave;s intimement, non ?", nous insinue Patric Chiha, le r&eacute;alisateur, &agrave; qui on a pos&eacute; aussi deux ou trois questions, qui &eacute;voque "nos batailles entre nos fantasmes et notre r&eacute;el, nos r&ecirc;ves et nos vies" et qui voulait "filmer en m&ecirc;me temps ceux qui passent &agrave; c&ocirc;t&eacute; de la vie et ceux qui vivent dans un pr&eacute;sent permanent, &agrave; la fois euphorique et morbide", c&rsquo;est-&agrave;-dire ces clubbeurs et clubbeuses qui sont la mati&egrave;re vibrante du film, sa mo&euml;lle magn&eacute;tique, tous ces corps en fusion unis dans un m&ecirc;me &eacute;lan que Patric Chiha n&rsquo;h&eacute;site pas &agrave; d&eacute;peindre comme "politique". "C&rsquo;est aussi un film sur des gens qui ne produisent rien&hellip; Parce que le clubbing est par essence non productif : si nous allons en club, c&rsquo;est juste pour danser. Il n&rsquo;y a pas d&rsquo;autre but."

Dans le club
Au-del&agrave; donc de cette qu&ecirc;te nimb&eacute;e de myst&egrave;re qui dessine une trame au film (s&rsquo;aimeront-ils, s&rsquo;il s&rsquo;agit bien d&rsquo;aimer ?), La B&ecirc;te dans la jungle&nbsp;nous invite &agrave; entrer en rupture avec le dehors (la vie de tous les jours, l&rsquo;ext&eacute;rieur de la salle obscure) et en r&eacute;sonance avec le dedans (la bo&icirc;te de nuit, la salle de cin&eacute;ma) : nous sommes plong&eacute;s, avec les personnages, dans cet espace-temps communiel et festif qui transcende la morosit&eacute; du quotidien (et d&rsquo;un cin&eacute;ma format&eacute;), et qui bouscule, dans un m&ecirc;me tressaillement, nos petites habitudes de spectateur habitu&eacute; &agrave; vouloir tout comprendre. Rupture avec les valeurs productivistes de notre soci&eacute;t&eacute; dans un d&eacute;sir de transgression et de r&eacute;sistance, sous l&rsquo;excitation magique de la prox&eacute;mie des corps, dans une ambiance de huis clos oc&eacute;anique (le "je" dans le "nous") o&ugrave; r&eacute;sonnent les nappes suaves du disco (les seventies), les battements rapides de la techno (les nineties),&nbsp; au milieu d&rsquo;un dancefloor (le film a &eacute;t&eacute; tourn&eacute; au Mirano) avec la danse vue et v&eacute;cue comme une sorte d&rsquo;utopie, et donc l&rsquo;amour aussi. D&rsquo;ailleurs, c&rsquo;est pour &ccedil;a que John ne danse pas. Parce qu&rsquo;il est "&agrave; c&ocirc;t&eacute; de la vie" et entra&icirc;ne Mae dans son sillage. Peut-&ecirc;tre est-ce lui, au final, "la b&ecirc;te dans la jungle"&hellip; Bref, comme le r&eacute;sume plus clairement Ana&iuml;s Demoustier : "L&rsquo;id&eacute;e de Patric n&rsquo;&eacute;tait pas de faire un film naturaliste ou en costumes, et d&rsquo;ailleurs il ne voulait pas que je lise la nouvelle de Henry James ! C&rsquo;est pour &ccedil;a qu&rsquo;il a choisi de transposer l&rsquo;histoire dans une bo&icirc;te de nuit, o&ugrave; tout est permis et o&ugrave; rien n&rsquo;est normal&hellip; Et donc je suis rentr&eacute; dans le film par la danse, pas par la litt&eacute;rature, en bossant avec un chor&eacute;graphe (Lorenzo De Angelis, ndlr)." Tourn&eacute; en plein Covid, dans un "d&eacute;sir transgressif et tr&egrave;s fort de danser tous ensemble", le film se sert donc du clubbing pour &eacute;voquer le temps qui passe, nous &eacute;chappe ou nous rattrape, en s&rsquo;&eacute;talant sur vingt-cinq ans (de 1979 &agrave; 2004), avec la gestuelle des danseurs &eacute;voluant au gr&eacute; de toutes ces nuits fauves (de Mitterrand au sida, de la chute du Mur au 11 septembre). "Pi&eacute;g&eacute;s dans cette bo&icirc;te comme dans une toile d&rsquo;araign&eacute;e", l&rsquo;une danse, l&rsquo;autre pas, et on regarde tout &ccedil;a dans un &eacute;tat de semi-conscience alt&eacute;r&eacute;e, comme si le temps n&rsquo;existait plus : un peu comme si Gaspard No&eacute; avait r&eacute;alis&eacute; un remake de Orph&eacute;e, ou qu&rsquo;on &eacute;tait rest&eacute; coinc&eacute; avec Naomi Watts dans Mulholland Drive&nbsp;(la sc&egrave;ne au club Silencio). "Tous les films que j&rsquo;aime ont comme sujet le temps et la repr&eacute;sentation du temps", nous souffle Patric Chiha alors qu&rsquo;on lui cite pompeusement du Roland Barthes ("Toute rupture un peu ample du quotidien introduit &agrave; la F&ecirc;te")&hellip; Tandis qu&rsquo;Ana&iuml;s Demoustier, elle, nous parle avant tout de son "plaisir" &agrave; travailler avec des r&eacute;alisateurs qui ont "une vision, un vrai d&eacute;sir fort de cin&eacute;ma, une v&eacute;ritable envie de recherche, une v&eacute;rit&eacute;, quoi", et on acquiesce &eacute;videmment (on l&rsquo;adore, faut bien le dire). Franchement : vous ne verrez pas cette ann&eacute;e d&rsquo;autres films comme La B&ecirc;te dans la jungle. N&rsquo;ayez pas peur de vous laisser aller.

LA BÊTE DANS LA JUNGLE réalisé par Patric Chiha - Bande-annonce

La B&ecirc;te dans la jungle&nbsp;de Patric Chiha, avec Ana&iuml;s Demoustier, Tom Mercier, B&eacute;atrice Dalle &ndash; dans toutes les bonnes salles de cin&eacute;ma &ndash; <a href="filmsdulosange.com" target="_blank" rel="noopener">filmsdulosange.com</a>

"La Bête dans la jungle" : du cinéma comme dans une rave

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