Sur les r&eacute;seaux, une tendance dangereuse glorifie les coups de soleil au m&eacute;pris des risques vitaux.

Alors que nous v&eacute;n&eacute;rons la jeunesse &eacute;ternelle, les soins cutan&eacute;s de pointe et les injectables invisibles, une tendance en apparence anodine fait tache sur les r&eacute;seaux sociaux : la glorification des marques de bronzage. Sur TikTok et Instagram, des milliers de jeunes exposent fi&egrave;rement leurs lignes de bikini comme des troph&eacute;es estivaux avec les #TanLines et #BurnLines. Mais derri&egrave;re ces clich&eacute;s ensoleill&eacute;s se cache une r&eacute;alit&eacute; bien plus sombre &mdash; celle d&rsquo;une g&eacute;n&eacute;ration pr&ecirc;te &agrave; compromettre sa sant&eacute; pour quelques semaines de bronzage.

L&rsquo;illusion dor&eacute;e d&rsquo;un bronzage parfait

Depuis l&rsquo;&eacute;t&eacute; 2024, les plateformes sociales regorgent de vid&eacute;os c&eacute;l&eacute;brant le bronzage, parfois jusqu&rsquo;&agrave; la br&ucirc;lure. Les influenceurs y d&eacute;voilent leurs "routines bronzage" et conseillent d&rsquo;aller s&rsquo;exposer lorsque l&rsquo;indice UV atteint des niveaux extr&ecirc;mes &mdash; entre 7 et 11 &mdash; ignorant totalement les recommandations sanitaires. Pire encore, certains s&rsquo;adonnent &agrave; des pratiques dangereuses, comme l&rsquo;usage de sprays nasaux ill&eacute;gaux surnomm&eacute;s "Barbie drug", ou se rendent dans des "collariums", cabines de bronzage d&eacute;guis&eacute;es en soins beaut&eacute;.
Ce culte du bronzage est d&rsquo;autant plus incompr&eacute;hensible qu&rsquo;il s&rsquo;oppose frontalement aux messages de pr&eacute;vention martel&eacute;s depuis des d&eacute;cennies : non, le soleil n&rsquo;est pas un alli&eacute; beaut&eacute;. Chaque exposition excessive engendre des dommages irr&eacute;versibles : vieillissement pr&eacute;matur&eacute;, destruction du collag&egrave;ne, cancers de la peau &mdash; dont le m&eacute;lanome, le plus agressif. Cinq coups de soleil avant l&rsquo;&acirc;ge de 20 ans augmentent de 80% le risque d&rsquo;en d&eacute;velopper un jour. Pourtant, ces r&eacute;alit&eacute;s m&eacute;dicales semblent s&rsquo;effacer derri&egrave;re le prisme dor&eacute; des filtres Instagram.

Une jeunesse consciente&hellip; mais d&eacute;sinvolte

Ce paradoxe est troublant. Les jeunes savent &mdash; en grande majorit&eacute; &mdash; que le soleil est nocif. Pourtant, pr&egrave;s d&rsquo;un tiers d&rsquo;entre eux pensent qu&rsquo;il est acceptable de bronzer &agrave; leur &acirc;ge. Et moins de 10% utilisent syst&eacute;matiquement les cinq formes de protection recommand&eacute;es : v&ecirc;tements couvrants, cr&egrave;me solaire SPF 50+, chapeau &agrave; larges bords, lunettes de soleil et recherche d&rsquo;ombre.
&Agrave; la place, ils normalisent le coup de soleil, qu&rsquo;ils qualifient de "pr&eacute;-bronzage". Ce comportement, popularis&eacute; par des figures influentes de la mode et du bien-&ecirc;tre, v&eacute;hicule un message aussi dangereux qu&rsquo;erron&eacute; : que la beaut&eacute; imm&eacute;diate justifie les risques &agrave; long terme. Une mentalit&eacute; symptomatique d&rsquo;une soci&eacute;t&eacute; obs&eacute;d&eacute;e par la gratification instantan&eacute;e.

Quand la pr&eacute;vention peine &agrave; rivaliser avec les algorithmes

Le probl&egrave;me n&rsquo;est pas tant le manque d&rsquo;information que le manque de r&eacute;sonance. &Agrave; l&rsquo;&egrave;re du scroll infini, les campagnes de pr&eacute;vention peinent &agrave; concurrencer les vid&eacute;os virales. L&agrave; o&ugrave; autrefois certains messages faisaient autorit&eacute;, ils doivent aujourd&rsquo;hui se r&eacute;inventer pour exister au sein d&rsquo;un &eacute;cosyst&egrave;me o&ugrave; les influenceurs dictent les normes de beaut&eacute;.
Certaines institutions en ont pris conscience et tentent de reprendre la main, notamment avec des campagnes qui mobilisent cr&eacute;ateurs de contenu, marques et figures publiques pour renverser la tendance. L&rsquo;objectif : cr&eacute;er une nouvelle norme sociale dans laquelle la peau naturelle et prot&eacute;g&eacute;e devient d&eacute;sirable.

Une beaut&eacute; fa&ccedil;onn&eacute;e par l&rsquo;histoire

Ironiquement, le bronzage n&rsquo;a pas toujours &eacute;t&eacute; un id&eacute;al. Pendant des si&egrave;cles, une peau p&acirc;le &eacute;tait synonyme de richesse, tandis que le h&acirc;le &eacute;voquait le labeur des classes populaires. Il a fallu attendre le retour de Coco Chanel d&rsquo;un voyage &agrave; Cannes en 1923, bronz&eacute;e par le soleil m&eacute;diterran&eacute;en, pour que l&rsquo;image du bronzage s&rsquo;inverse &mdash; devenant d&egrave;s lors un symbole de luxe, d&rsquo;&eacute;vasion et de modernit&eacute;.
Depuis, la mode, les campagnes publicitaires, les r&eacute;seaux sociaux et les filtres num&eacute;riques ont largement entretenu cette norme. M&ecirc;me les produits de bronzage sans soleil &mdash; consid&eacute;r&eacute;s comme s&ucirc;rs &mdash; participent &agrave; cette glorification du teint h&acirc;l&eacute;. Pourtant, ils perp&eacute;tuent l&rsquo;id&eacute;e selon laquelle une peau dor&eacute;e serait plus belle ou plus saine, maintenant ainsi la pression sociale qui pousse tant de jeunes &agrave; s&rsquo;exposer sans protection.

Au fond, le paradoxe est cruel : alors que l&rsquo;industrie des soins anti-&acirc;ge prosp&egrave;re, la m&eacute;thode la plus efficace &mdash; et la moins glamouris&eacute;e &mdash; reste la cr&egrave;me solaire. Aucun s&eacute;rum, aucune injection ne peut r&eacute;parer les dommages cellulaires caus&eacute;s par les UV. Chaque minute pass&eacute;e &agrave; "cuire" sur le sable grignote un peu plus la jeunesse de la peau.
Il est temps de red&eacute;finir ce que signifie "rayonner". Il ne s&rsquo;agit pas de briller sous les projecteurs d&rsquo;un bronzage temporaire, mais d&rsquo;embrasser la beaut&eacute; de sa peau dans son &eacute;tat naturel &mdash; claire, mate, tachet&eacute;e, ros&eacute;e, peu importe. La vraie confiance ne vient pas d&rsquo;un teint uniforme ou d&rsquo;un reflet dor&eacute;, mais de la certitude que l&rsquo;on prend soin de soi &mdash; aujourd&rsquo;hui et pour demain.

Et si la tendance, c&rsquo;&eacute;tait la prudence ?

Le soleil est une merveille naturelle, une source de bonheur, d&rsquo;&eacute;nergie, de souvenirs d&rsquo;&eacute;t&eacute;. Mais il ne doit pas &ecirc;tre un ennemi d&eacute;guis&eacute;. On peut aimer l&rsquo;&eacute;t&eacute; sans en payer le prix fort. On peut s&rsquo;immerger dans l&rsquo;eau, courir sous le ciel bleu, rire entre amis sur la plage &mdash; tout en &eacute;tant prot&eacute;g&eacute;.
Car la ligne de bronzage qui fait fureur sur TikTok aujourd&rsquo;hui pourrait bien &ecirc;tre la cicatrice invisible de demain. Et aucune tendance ne vaut notre sant&eacute;.

"Tan lines" et "burn lines" : la dangereuse obsession du bronzage sur TikTok

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